Cibercontrole. l'employeur a-t-il le droit de contrôler l'activité des salariés ?

Réponse: 

L’employeur a-t-il le droit de contrôler l’activité des salariés ?

L’employeur a le droit de surveiller et de contrôler l’activité des salariés de son entreprise pendant le temps de travail (Cass. soc. 14/03/2000, n°98-42090). Le tout numérique facilite ce contrôle patronal. Pour autant, l’employeur doit respecter la part d’intimité irréductible de la vie privée du salarié pendant le temps et sur son lieu de travail (Cass. soc. 02/10/2001, n°99-42942, art. 9 C. civ., art. 1121-1 C. trav.).
En effet, les salariés ne peuvent être soumis à une cybersurveillance ou à un cybercontrôle général et permanent.

L’employeur peut-il utiliser un dispositif de vidéosurveillance sur les lieux de travail ?

L’employeur peut utiliser des caméras vidéo pour surveiller des locaux de travail ou encore l’activité des salariés à la condition que cela soit justifié par des besoins impérieux de l’entreprise et qu’il n’existe aucune solution alternative. La mise en œuvre de la vidéosurveillance doit être proportionnée au but poursuivi et ne doit pas porter une atteinte excessive aux droits et libertés des salariés (art. L. 1121-1 C. trav.). Il est notamment interdit d’installer des caméras dans des vestiaires, des douches ou des toilettes. De même, la vidéosurveillance ne doit pas être utilisée pour identi er les salariés qui accèdent à un local syndical.
La vidéosurveillance peut faire appel à des moyens informatiques d’enregistrement numérique et de traitement des données. Dans cette hypothèse, elle doit faire l’objet d’une déclaration à la CNIL.
En cas d’utilisation de la vidéosurveillance, l’employeur doit non seulement informer les salariés de la mise en place d’un tel système, mais également préciser l’utilisation qui pourrait être faite à leur encontre (contrôle de l’activité professionnelle, notamment des horaires de travail : Cass. soc.10/01/2012, n° 12-23482).
Les images ne doivent être conservées que dans un court délai, de quelques jours à un mois au maximum, et ne doivent être visionnées que par des personnes habilitées et dans les hypothèses qui correspondent à la nalité du dispositif. Lorsque la vidéosurveillance concerne des lieux de travail qui sont aussi des lieux ouverts au public, l’employeur doit également obtenir préalablement une autorisation préfectorale.

L’employeur peut-il imposer l’utilisation d’un badge sur le lieu de travail ?

L’employeur peut demander aux salariés d’utiliser des badges électroniques pour gérer le contrôle des accès sur les lieux de travail, le contrôle des horaires et du temps de travail, ou l’accès à la restauration collective. Les dispositifs de badges électroniques qui enregistrent des données sur un support informatique doivent être déclarés (régime de déclaration simpli ée) à la CNIL.

L’employeur peut-il mettre en place un dispositif biométrique pour identifier le salarié sur le lieu de travail ?

Les dispositifs biométriques permettent d’identi er une personne par ses caractéristiques physiques, biologiques ou comportementales. Il s’agit, par exemple, de la reconnaissance des empreintes digitales, du contour de la main, du réseau veineux de la main, de l’iris de l’œil, de la voix ou encore du visage.
Ils sont généralement utilisés pour gérer notamment le contrôle des accès aux lieux de travail, de l’utilisation de la restauration collective, ou des horaires de travail.
Ces dispositifs sont soumis à un régime d’autorisation préalable ou, dans certaines hypothèses, d’autorisation simplifiée (par déclaration de conformité) par la CNIL. Ainsi la CNIL n’autorise plus les dispositifs reposant sur la reconnaissance de la main et ayant pour finalité la gestion des horaires car ce moyen est disproportionné par rapport à la finalité.
La mise en place de ces dispositifs doit correspondre à un besoin légitime impérieux de l’entreprise et doit être proportionnée à cette finalité eu égard au risque pour la protection des données personnelles recueillies. Elle ne peut pas être autorisée pour assurer d’une manière générale la sécurité des personnes et des installations de l’entreprise.
Ces dispositifs ne doivent pas entraver les missions des représentants du personnel, car l’exercice de celles-ci suppose parfois de circuler librement dans l’entreprise.

L’employeur peut-il géolocaliser ses salariés ?

L’employeur peut utiliser un dispositif de géolocalisation des véhicules de l’entreprise utilisés par les salariés. Un tel dispositif permet à l’aide d’une puce GPS de connaître la position géographique à un moment donné ou de retracer un déplacement dans le temps. Il peut avoir pour finalité d’assurer la sécurité du salarié ou des marchandises transportées, de facturer une prestation liée à l’utilisation du véhicule, d’optimiser les déplacements du véhicule et accessoirement de contrôler le temps de travail.
Un tel dispositif ne doit pas permettre de caractériser des infractions au Code de la route (excès de vitesse, circulation à contresens, etc.).
À noter ! Dans une délibération du 04/06/2015 (n° 2015-165), la CNIL a renforcé l’encadrement du recours au dispositif de géolocalisation par les entreprises.
Les données de géolocalisation ne peuvent être conservées que sur une courte période qui, sauf exception, ne peut excéder 2 mois.

L’employeur peut-il surveiller les communications téléphoniques et informatiques du salarié ?

Les messages envoyés ou reçus par les salariés, à destination ou de la part d’une personne extérieure ou interne à l’entreprise, transitent soit par un autocommutateur soit par le réseau informatique de l’entreprise. Dès lors, l’employeur est susceptible de conserver, archiver ou contrôler les conversations téléphoniques ou les courriers électroniques. Ainsi, les courriels écrits à l’aide de la messagerie professionnelle sont présumés avoir un caractère professionnel (Cass. soc. 16/05/2013, n° 12-11866), sauf s’ils sont identifiés comme personnels. Dans ce cas, l’employeur ne peut les consulter sans la présence du salarié sous peine de commettre le délit de violation du secret des correspondances (art. 226-15 C. pén.).
Si l’employeur est en droit de surveiller et de contrôler l’activité des salariés, ce n’est pas sans limite. En effet, il a un devoir de loyauté dans la relation de travail et ne doit pas apporter une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée (art. 9 C. civ.). Ce droit implique qu’un employeur ne peut pas empêcher totalement un salarié d’utiliser les moyens de communication de l’entreprise à des fins personnelles. Cette utilisation par le salarié dans le cadre de sa vie privée implique l’absence de surveillance ou de contrôle sur les correspondances (pour les courriels, Cass. soc. 02/10/2001, n°99-42942). Pour s’assurer du respect du secret des correspondances, il est nécessaire que le salarié identifie clairement leur caractère privé, par exemple, en mentionnant le caractère personnel dans l’objet d’un courriel.
À noter ! Est sans cause réelle et sérieuse le licenciement d’un salarié qui abusé de sa messagerie professionnelle à des fins personnelles avant sa déclaration à la CNIL (Cass. soc. 08/10/2014, n° 13-14991).
À noter ! Il existe des réglementations qui prévoient l’enregistrement des conversations téléphoniques.

L’employeur peut-il surveiller l’utilisation des sms ?

Les sms envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l’employeur pour le travail sont présumés avoir un caractère professionnel. L’employeur peut les consulter hors la présence du salarié, sauf s’ils sont identifiés comme personnels (Cass. soc. 10/02/2015, n° 13-14779).

L’employeur peut-il surveiller et contrôler l’utilisation d’un ordinateur ?

Lorsque l’employeur met un ordinateur à la disposition d’un salarié pour la réalisation de son travail, il s’attend normalement à ce que les fichiers créés par le salarié à l’aide de cet ordinateur et les connexions internet durant le temps de travail aient un caractère professionnel. Il en résulte l’existence d’une présomption que ces fichiers soient professionnels. L’ordinateur est la propriété de l’entreprise et, même en l’absence du salarié, un responsable hiérarchique a le droit d’accéder librement aux données contenues dans ces fichiers (Cass. soc. 15/12/2009, n°07-44264 ; Cass. soc. 18/10/2006, n°04- 48025). De plus, même en l’absence du salarié, l’employeur peut avoir accès aux fichiers contenus dans la clé USB du salarié connectée à l’ordinateur professionnel, dès lors qu’ils ne sont pas identifiés comme personnels (Cass. soc. 12/02/2013, n° 11-28649). Pour autant, l’employeur ne peut pas s’opposer totalement à une utilisation de l’ordinateur à des fins personnelles, mais de manière subsidiaire. Il en résulte que si le salarié identifie le caractère personnel d’un fichier, l’employeur n’a pas le droit de l’ouvrir hors de sa présence (Cass. soc. 17/05/2005, n°03-40017). L’abus (utilisation systématique ou lorsque le salarié y consacre trop de temps au détriment de son travail) peut justifier une sanction ou un licenciement (Cass. soc. 26/05/2013, n° 11-27372).

L’employeur peut-il contrôler l’utilisation de Facebook ?

Des propos tenus sur le « mur » privé d’un salarié, accessible à ses seuls « amis » ou « contacts » en nombre restreint, ne constituent pas des injures publiques en droit pénal. Mais les propos du salarié qui a abusé de sa liberté d’expression peuvent justifier un licenciement (Cass. 1è civ. 10/04/2013, n° 11-19530). 

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